En mars, Lucie Paquy et Dimitri Champolion ont rencontré plusieurs jeunes en formation dans les établissements de la chambre. Ils sont apprentis ou étudiants, agés de 17 à 25 ans,en formation de niveau 5 à 2.
Leurs réponses et leur engagement durant la discussion montrent combien le rapport qu’ils entretiennent avec leurs écoles respectives et l’école au sens large, est fort.
Quelques images des échanges, et quelques verbatim afin de vous en donner la tonalité.
Ce focus group a permis d’alimenter les questionnements que nous proposons aux intervenants qui participeront à l’université que nous préparons. Grâce à eux, notre réflexion pédagogique poursuit son chemin.
Question: Si je vous dis « réussite » : Quels sont les mots qui vous viennent spontanément à l’esprit ?
« Diplôme, mérite, succès, reconnaissance, sacrifice, investissement, patron, célébrité, travail, emploi, effort, huile de coude, connaissance, professionnel, épanouissement, ouverture sur le monde. »
« La réussite est personnelle, c’est surtout atteindre ses objectifs. »
« La réussite collective ? Oui, c’est être un meneur, un leader, amener les autres vers la réussite ! »
« Réussir : exemple le chef réussit à faire sortir de la brigade de bons plats, il a une réussite individuelle, mais aussi collective ! »
« Il ne faut pas non plus que le côté professionnel étouffe trop l’éducation. On nous forme également comme futur acteur de notre société. Et le monde professionnel doit également se nourrir de ce matériel qu’on nous inculque. Et ils se complètent. »
Question: Avez-vous un jour vécu un cours un peu exceptionnel, qui vous a paru trop court ?
« Notre prof de maths : ça tenait à son charisme et son parcours. C’est le seul prof qui est non chercheur mais ingénieur. Il nous faisait passer au tableau, il préparait son cours, son timing, on sentait beaucoup de travail derrière… C’était pas le prof qui vient nous déballer son savoir. Quand il passait dans les rangs de l’amphi, c’était calculé, car il sentait un peu de bruit. Il avait réfléchi au rythme à adopter si on était en début de cours ou en fin de cours où il savait qu’on pouvait être fatigué. Il savait quand aller vite et quand ralentir. Ça se voyait… »
Question: Et le vivre-ensemble, au –delà des clichés politiquement corrects ?
« Mais les professeurs sont différents là-dessus… Ceux qui ont du charisme, qui savent amener les choses, ceux qui sont des leaders auront moins de mal. C’est souvent l’ennui qui est à l’origine des débordements. Un prof captivant n’aura pas de problème de discipline… »
« Pour maîtriser les débordements, ce n’est pas la discipline qui compte, mais de faire grandir les élèves. Au fur et à mesure de leur cursus, on va nous faire prendre conscience qu’on sera ingénieur, des gens importants, des salariés à responsabilité… La sanction, ce n’est pas l’heure de colle mais le trimestre non validé, les frais de scolarité passés pour rien. A 20 ou 25 ans, on n’a plus à manier le bâton… Entre la 1e et la 2e année on prend conscience qu’on n’est plus en train de jouer. »

Lorsque l’on témoigne de son vécu en formation, on recherche les expressions qui correspondent précisément à son point de vue. C’est le cas sur l’évaluation.
Question: Quel type d’évaluation vous met le plus à l’aise ?
« Selon moi il y a plus de subjectivité dans l’évaluation professionnelle, les critères sont peut-être moins homogènes. Il faut aussi distinguer l’évaluation statique et l’évaluation dynamique. »
« Moi qui suis en apprentissage, les contrôles sur les matières pratiques, c’est plus facile que les matières générales (sciences, maths). »
« Si on échoue dans le milieu professionnel, cela aura des conséquences sur l’équipe, l’entreprise. Si on échoue dans le cadre de ses évaluations éducatives, c’est notre problème. Il y a plus de pression dans l’évaluation professionnelle. »
« Un peu de philo : l’homme se reconnaît à travers le regard de l’homme. Si on rend un projet en entreprise, on va voir le regard des autres personnes et on va se sentir bien, à l’aise. Quand on fait un devoir, et qu’on a une note, si on a un 7 ou un 13, cela nous regarde soi, c’est individuel. En entreprise, si on veut faire de l’individuel, on va travailler dans une start-up ! Quand on travaille dans une entreprise, après chaque étape, il y a des attentes des collaborateurs et des supérieurs. »
« Etre fier de ses bonnes évaluations dans le milieu scolaire, c’est un peu de l’égoïsme. Par contre, entre entreprise, si on présente un projet à son supérieur et qu’il le présente aux collaborateurs, on sent qu’on a été bénéfique pour d’autres personnes. Etre bon en entreprise, c’est être généreux. »